Dans un royaume où l’image est loi,
Vivait un Corps Beau, las de ses traits d’autrefois.
Il rêvait d’un éclat, d’une divine harmonie,
Et vint quérir la Reine Art, maîtresse en chirurgie.
« Ô Reine des formes, sculptez-moi parfait !
Effacez mes rides, mes défauts imparfaits.
Que je sois admiré, envié de tous,
Un chef-d’œuvre vivant, sans ombre ni courroux. »
La Reine Art, pinceau à la main, répondit :
« Beauté n’est point simple, elle se mérite aussi.
Je peux tailler ton corps, polir ton visage,
Mais gare à l’excès : il devient esclavage. »
Ainsi commença l’œuvre de transformation :
Un nez redessiné avec précision,
Des lèvres gonflées d’un soupçon de désir,
Et des courbes sculptées pour mieux séduire.
Le Corps Beau s’émerveillait du miroir :
« Enfin je suis divin ! Quelle gloire ! »
Mais à force de retouches et de perfection,
Il perdit son essence dans cette obsession.
Ses traits si lisses devinrent sans âme,
Un masque figé où nul cœur ne s’enflamme.
Les regards qu’il cherchait étaient bien présents,
Mais vides d’amour, froids et distants.
La Reine Art le vit et murmura doucement :
« La beauté est fragile quand elle perd son fondement.
Je suis artiste, non magicienne ;
La vraie splendeur naît d’une âme sereine.
En quête de beauté, ne perds pas ton essence ;
Car l’artifice peut ternir ta présence.
La médecine embellit quand elle reste mesurée ;
Mais l’excès la rend piège et vanité.